Affaire des caricatures de Mahomet : la République des lettres contre Charlie Hebdo (Caroline Brancher)
A la veille du procès contre Charlie Hebdo qui doit se tenir les 7 et 8 février, la République des lettres a décidé de publier un texte mensonger donnant le sentiment que Charlie Hebdo s'en est pris aux musulmans alors que le journal s'est est pris aux intégristes sous le titre « Procès de Charlie Hebdo pour injures publiques contre les musulmans »
Pour rappel, Charlie Hebdo a reproduit les caricatures dans un but, d'une part, de solidarité vis à vis des journalistes menacés suite à la publication des 12 dessins dans d'autres journaux (ce qui est louable à bien des égards) et, d'autre part, pour se moquer des intégristes (et non des musulmans)
Le dessin de couverture, fait par Cabu, titrait « Mahomet débordé par les intégristes » puis représentait Mahomet, se tenant la tête entre les mains et disant « C'est dur d'être aimé par des cons ». On ne sait si c'est par myopie ou mauvaise intention, mais le rédacteur (anonyme) de la République des lettres sous entend que les musulmans sont les seuls visés par cette couverture. L'oubli est de taille. Ce sont bel et bien les intégristes qui sont visés par ce dessin et non l'ensemble de la communauté musulmane comme aimerait bien nous le faire avaler la République des lettres en falsifiant la couverture de Charlie Hebdo. Finalement, que devrions nous comprendre ? Que dire des intégristes d'une religion que ce sont des cons est une attaque contre les croyants de cette même religion ? N'est ce pas aboutir à une forme de pensée confuse ou musulman serait égal à intégriste égale à con ? Car c'est bien cela que nous explique l'amnésie partielle du corbeau de la République des lettres. En voyant intégriste, il voit musulman, ce que Charlie n'a pas écrit. Ca en dit long sur la finesse du volatile. Les trois caricatures qui font l'objet de la plainte contre Charlie Hebdo sont le dessin de Cabu publié en Une du journal et les deux dessins issus de la série des douze caricatures publiées dans le quotidien danois Jyllands : l'une montre Mahomet en train d'accueillir des terroristes au paradis et l'autre représente Mahomet coiffé d'un turban d'où sort une bombe. La République des lettres dit de ces trois caricatures du prophète Mahomet qu'elles sont « violentes »
Pour la République des lettres, la dénonciation de l'intégrisme et de l'obscurantisme islamiste avancée par Charlie Hebdo pour justifier la publication des dessins ne serait que « des arguments fallacieux » La République des lettres, par ignorance ou complaisance (allez savoir), a visiblement choisi de sous estimer voir de fermer les yeux face à la dangerosité de l'intégrisme musulman. Selon elle, le véritable but de Charlie Hebdo serait beaucoup moins louable que la défense de la laïcité et de la liberté d'expression : Charlie Hebdo ne chercherait en réalité qu'à jouer « la carte politique anti-Chirac et anti-Sarkozy » Sans avoir le courage de citer le moindre nom et donc d'assumer ainsi sa position, la République des lettres accuse Charlie Hebdo de compter parmi ses partisans « une vaste clique de communautaristes juifs et d'islamophobes notoires » Comment s'en étonner. La République des lettres a publié de longs développements sur Bruno Megret sans grand recul. A propos de Robert Redeker, le corbeau de la République des lettres écrivait : « Hormis les intellectuels communautaristes juifs (Alain Finkielkraut, Bernard-Henri Lévy, André Glucksmann,...), les leaders politiques de la Droite extrême (Philippe de Villiers, Jean-Marie le Pen, le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy qui l'a "soutenu de la façon la plus nette"), et certains grands médias audiovisuels l'ont très activement défendu, lui et ses propos islamophobes »
La République des lettres est la reprise d'un titre existant depuis longtemps. Un titre qui a une certaine résonance dans le milieu enseignant. Le titre a été repris de 94 à 98 par l'éditeur Noël Blandin qui semble diriger le site internet. Dans un texte présentant ses ambitions il n'hésitait pas à lister « un groupe restreint de canailles » dont il donnait les noms. Selon sa propre présentation on peut lire : « plusieurs journaux prennent successivement le titre de République des Lettres, auxquels collaborent nombre de gens de lettres et de grands écrivains, comme entre autres Balzac, Alexandre Dumas, Victor Hugo ou Fedor Dostoïevski, qui y publient articles ou roman-feuilletons. Aujourd'hui, l'esprit et la sociabilité d'origine ont été remplacés par de nouvelles formes de communication médiatiques mais la notion de République des Lettres désigne toujours communément, pour le pire et le meilleur, le monde des Livres, des Lettres, de la Politique et de la Culture » A ceci près que les nouveaux auteurs de ce torchon signent rarement leurs éditos, qu'ils surfent sur une marque qui a du prestige et qu'ils confondent les nouveaux moyens de communication avec les lettres de dénonciation anonymes.